Une chasse aux plantes... Épineuse ? [LIBRE]

C'était à se demander ce qui avait poussé la solitaire a traversé ce territoire ennemi si tard dans la journée ! Ébène avait peut-être l'habitude de prendre de tels risques, toujours dans le faux espoir de rencontrer quelqu'un qui la ferait payer ses crimes immondes, quelqu'un qui la laverait de ses péchés en lui causant la blessure qui serait de trop et qui serait sa dernière. C'est ce qu'elle ne cessait de se raconter en posant patte après patte, l'une devant l'autre en vacillant légèrement. Cependant, elle savait une chose qu'elle ne pouvait nier : si elle avait vraiment désirer le repos sans réveil, ne serait-elle pas allée directement dans les sordides ruelles de la ville ? Au même endroit où elle avait déjà frôlé la mort quelques lunes auparavant ?

Au bout du compte, ne tenait-elle pas encore à la vie ?

La solitaire bicolore se questionnait quant à ses intentions véritables. Depuis sa rencontre avec un guerrier du coin, il y a une lune ou deux - elle n'arrivait jamais à prendre conscience du temps s'écoulant - elle se surprenait à chercher la compagnie des autres. Uniquement pour attirer leur attention, pour savoir si elle était tant dans le tort. Ce qu'ils racontaient était-il des mensonges, comme tout ce qu'elle avait entendu dans sa vie, ou y avait-il une part de vérité ?

Ébène cracha faiblement en direction d'une ronce qui s'était empêtrée dans sa patte. C'était douloureux, mais son pelage était déjà d'une telle crasse que les épines qu'elle récolterait dans ce maudit chemin s'y perdrait sûrement ! Elle sentait chacune des griffures qui parcouraient sa peau et ça la démangeait furieusement. Était-ce vraiment la bonne chose de se laisser dépérir ainsi ? Sa courte fourrure noire et blanche était peut-être encore présente dans sa mémoire, mais uniquement car elle avait dû passer dans un ruisseau ce matin. Ou était-ce hier ? Elle avait ensuite trébuché sur la berge boueuse et cette même gadoue s'était répandue sur son pelage. Le temps qu'elle sèche, la solitaire avait semblait-il récolté toute la flore qu'elle avait pu croiser en chemin.

Une énième piqûre vint à bout de sa patience éphémère : la jeune femelle aurait voulu s'arracher la fourrure pour en venir à bout. Pourquoi s'était-elle si stupidement enfoncée dans ce passage rempli d'aubépines ? Elle s'assit brutalement pour se mettre immédiatement à nettoyer son pelage, comme elle le pouvait. En apercevant à quoi ressemblait sa fourrure, elle eut honte. Elle se rappelait quand elle sermonnait ses petits dès qu'ils avaient la moindre éclaboussure qui souillait leurs poils. Particulièrement Lumière, se souvint-elle, qui avait été si blanc, si pur...

Ébène feula de rage et continua se décrasser avec fureur. Elle s'arrachait presque des touffes de poils, tellement elle était irritée. Sa soeur au pelage long n'aurait jamais supporté de la côtoyer, si elle avait eu une telle apparence ! Sa mère l'aurait jetée dehors. Mais après tout, qui s'en préoccupait ? Elles l'avaient fait malgré sa propreté irréprochable ! Du moins, physique, car intérieurement, elle n'était que saleté.

La solitaire se figea avec horreur quand elle renifla. Cela sentait la forêt, celle toute proche. Cela sentait le chat, un félin qui n'était pas elle. Elle regarda avec panique autour d'elle, se reprochant son imprudence de s'être arrêtée en plein territoire ennemi. Elle n'avait pas eu l'intention d'y faire un arrêt : elle avait initialement prévu d'y couper pour se rendre plus rapidement en ville. Elle était trop près, beaucoup trop proche de l'endroit où elle savait y avoir un regroupement de chats. Comment avait-elle pu l'oublier ?

La femelle repéra devant elle un éclat blanc. Éclat blanc d'un pelage félin, qui venait certainement d'un de ces Clans qui la courserait comme la misérable qu'elle était. Quand apprendrait-elle à rester chez les humains, là où était sa place ? Peut-être quand elle cesserait de craindre l'apparition soudaine d'un mâle des ruelles, ou de l'un de leur bande...

Elle cria avec précipitation, car elle savait être découverte :

- Je ne vous veux pas de mal ! Je m'en vais ! Je n'ai pas pris de gibier, je m'en vais !