Et un jour, mon monde sera le tien. | PV Lune Éternelle

Etoile de Mandragore

La souche éternelle et ancestrale.

Voilà de nombreuses lunes qu'Étoile de la Mandragore avait découvert ce lieu de rassemblement, alors qu'il n'était qu'un jeune apprenti. Sa première assemblée restera gravée dans sa mémoire. Un apprenti du Clan des Ténèbres était venu le voir, et le caractère vantard du novice faisant l'éloge de son Clan avait marqué le meneur. Et chaque assemblée suivante auxquelles il avait participé fut marquante. Mais il n’oubliera jamais le jour où il dû se présenter devant tous les clans, grimper sur la souche aux côtés des autres meneurs. Il avait attendu ce moment avec appréhension. Et le voilà maintenant toutes les pleines lunes face à ses camarades, renseignant les clans sur les nouvelles du sien. Il avait vu apparaître de nombreux apprentis, et vu disparaître nombre d'ancien. Et plus le temps filait, plus vite ce serai son tour.

Assis au sommet de la corniche, Etoile de Mandragore fixa la souche, se dessinant plus bas. Le croissant de lune s'élevait dans la voûte céleste et atteindrait bientôt son nadir. Les nuit fraîches avaient faites leur apparition avec la Saison des Feuilles Mortes. Le vieux meneur du Clan de la Brume venait souvent se reposer ici, se remémorer de doux souvenirs. Cette nuit là, il méditait sur l'avenir de son Clan. Il n'en doutait pas, sa lieutenante Lune Éternelle serai une chef exemplaire. Seulement, il aimait son Clan. Il ne ressentait pas encore le besoin de retrouver ses ancêtres. Il voulait guider son Clan jusqu'au bout, jusqu'à son dernier souffle. Alors, il pourra mourir en paix.
Le regard porté vers les étoiles, Etoile de Mandragore questionnait le Clan des Etoiles. L'avenir de son Clan allait-il être assuré ? Une question qu'il n'arrivait pas à s'ôter de l'esprit. Pourtant, un mouvement derrière lui retint son attention. Sans se retourner, il dressa les oreilles et huma l'air. Il mit peu de temps pour reconnaître l'étranger en question, reconnaissant son odeur entre mille.

« Bonsoir Lune Éternelle. »

Etoile de Mandragore

S'extirpant des fourrés, Lune Éternelle vint à sa rencontre.

Toujours sans bouger, le meneur attendit que sa lieutenante le rejoigne, le regard rivé vers la grande vallée à ses pieds. Un jour, cette femelle prendrai sa place, et dirigerai le Clan de la Brume. Il avait confiance en elle, mais d'après lui, elle n'avait pas toujours la sagesse nécessaire et ne prenait pas le temps de se poser les bonnes questions. Elle ne manquait pas de courage et de loyauté, et avait toujours les bonnes idées. Mais Etoile de la Mandragore tenait à la guider dans son poste, avant de lui laisser sa place.

« Bonsoir Etoile de Mandragore. Alors c'est là que tu disparais si souvent ? Quel lieu magnifique. »

Lune Éternelle se posa près de son chef. Les deux félins, se mirent à observer les cieux, dont les étoiles illuminait cette nuit. Du haut de la corniche, la forêt entière était visible, surplombant les territoires des Clans. Reportant son regard vers la Souche Ancienne, le meneur acquiesça. Il n'y avait pas plus bel endroit pour les Clans. Cette image qu'il avait du temps où les tribus n'était pas, où les solitaires en venaient aux crocs pour un simple part de gibier. Le jour où les quatre grands avaient faits leur apparitions avaient tout changer à jamais.

« En effet. Les territoires des Clans ont des terres sublimes. Nous devons nous en montrer fiers. »

La première fois qu'il avait grimpé au sommet de cette corniche, étant apprenti, le meneur avait été subjugué par cette beauté. Par delà les horizons, le soleil répandait sa douce lumière sur les étendues claniques, créant une atmosphère n'ayant pas son égal. Dès lors, il n'avait jamais rien retrouvé d'aussi beau.

« Que connais-tu sur l'histoire des Clans ? »

J'inspirai très profondément et je plongeai dans ma mémoire, il y a de nombreuses lunes, quand je n'était qu'une petite chatte et que mon chef actuel, alors fier guerrier, nous contait à mes camarades et moi l'histoire des Clans. Fermant les yeux, je commençai d'une voix douce et basse, la respiration posée :


-"Il y a de cela fort longtemps, à une époque où les territoires des Clans étaient partagés entre les domestiques et les solitaires, naquirent un jour quatre petits chatons. L’aîné fut nommé Muscari. Il était le plus fort et le plus robuste de toute la fratrie. Rupen fut le second, quand à lui né pour être rapide, ses pattes puissantes lui procurant une superbe vitesse. Celui qui suivit se fit appeler Drachen, doté d'une agilité que peu de chats possèdent. La petite dernière répondit au nom de Lilou, étant une nageuse hors-pair.
Chacun d'eux grandirent et apprirent aux côtés de leur parents. La chasse, le combat, et même la pêche. Lilou avait un vrai don avec l'eau, et était la meilleure pour la pêche. Sans nul doute, Drachen savait attraper les écureuils bien mieux que ses frères. Rupen était aussi rapide qu'un lièvre, et les chassait sans trop de difficulté. Quand à Muscari... Il était simplement le plus costaux, et écrasait ses frères au combat. La vie était paisible, et le peu de solitaires qu'ils rencontraient n'étaient pas souvent de taille face à eux. Leur apprentissage prit rapidement fin. Ils se détachèrent de leurs parents, et partirent à la découverte de toute l'étendue du territoire de la forêt.
Au fil de leurs périples, ils rencontrèrent de nombreux errants, solitaires et sans-colliers. Certains agressifs et d'autres pacifiques. Ils s'étonnèrent même de croiser des chats vivant en petits groupes.

Plusieurs lunes après leur retour de leur long périple, la forêt se préparait à une guerre imminente. Les conflits étaient réguliers entre les solitaires, tous voulant leur part du terrain. La colère de certains était telle qu'une bataille sanglante éclata au centre de la forêt, clairière connue pour sa tranquillité constante. Chacun combattait pour sa propre cause, ils ignoraient ce que signifie le mot "partage". L'on défiait le premier qui venait. Le ciel s'était obscurcit, comme s'il reniait cette guerre. Alertés par les fracas de cette brutalité, Muscari, Rupen, Drachen et Lilou accoururent sur le lieu de bataille. Face à cette horreur, ils prirent la décision de résonner la horde de combattants et d'un même mouvement, les quatre félins se hissèrent au sommet de la souche qui surplombait toute la clairière. Lors du puissant miaulement de Muscari, tous les belligérants se figèrent, interloqués. La voix du matou retenti aux oreilles de chacun. Il prononça un discours aujourd'hui oublié, mais qui fut incroyable. Le doute et la perplexité survint dans l'esprit de tous les félins présents à ce moment-là.

Les trois frères et la sœur avaient bien réfléchis, et s'étaient mis d'accord. Pour une bonne entente, des groupes distincts devaient se créer. Ceux qui le désireraient les rejoindraient, et les autres partiraient. L'idée ne fut pas bien reçue par tous, mais nombre d'entre eux l'adoptèrent. Pour que règnent l'ordre et la prospérité, ils se mirent d'accord sur un code à suivre. Celui transgressant ces règles se verrait puni. Les territoires furent répartis de façon équitable. Afin de garder cette entente à coup sur, chacun des frères prit la tête d'un des Clans. C'est ainsi que Muscari changea son nom pour Étoile Ténébreuse, prenant la tête du Clan des Ténèbres, vivant dans les terres les plus sombres, marécageuses et angoissantes de toute la forêt. Rupen devint Étoile des Lueurs, chef du Clan des Lueurs, dirigeant les plaines où les rayons du matin créaient un spectacle éblouissant. Quant à Drachen, il prit pour nom Étoile Lumineuse, devenant le meneur du Clan de la Lumière, vivant dans les forêts chaleureuses et ensoleillées. Enfin, la jeune Lilou dirigea le Clan de la Brume en tant qu’Étoile Brumeuse, prenant le territoire traversé par rivières et cours d'eau, où la brume et le brouillard étaient des plus fréquents.

La paix et l'harmonie s'installa sur la forêt, et au fil des générations, les chats des Clans apprirent à croire en leurs ancêtres, qui s'en allaient vivre dans les étoiles. Aujourd'hui encore, les Clans ont des croyances et coutumes bien présentes, ancrées dans les traditions.

Cette histoire tu me l'as conté il y a bien longtemps, quand je n'étais qu'une petite chatte curieuse et insouciante et toi, un farouche et fidèle guerrier, mais je ne l'ai jamais oubliée tellement elle m'a marqué."

Sans que je le remarqua, une larme coula sur ma joue, comme à chaque fois que je conte ou que j'écoute cette histoire. Notre histoire. Mon histoire. Un jour je la conterai à mes enfants et peut-être, si j'ai le bonheur de vivre assez longtemps, aux enfants de mes enfants. Je me relève brusquement et me met à marcher de long en large, je fais les cent pas. Je marchai de plus en plus vite. Respirai de plus en plus fort. J'étais de plus en plus agitée, inquiète. Je m'arrêtai tout aussi brusquement que j'avais commencé et je posa une question qui, sans en avoir forcément l'air était importante :

"Pourquoi me demandes-tu cela ? Combien de vies te reste-il ?"  

Il soupira profondément et me répondit d'une voix basse et triste, mais avec une pointe de tendresse:

« J'ai encore de quoi vivre durant nombreuses saisons. Mais 3 vies, pour un vieux matou faible et perdant de sa solidité, c'est bien peu. Alors je compte faire de toi la meilleure relève possible.»

Trois vies. C'était tant et pourtant si peu à la fois. Il pouvait régner sur le clan comme il l'a toujours fait depuis aussi longtemps que, je m'en souvienne, pendant encore de nombreuses lunes ou bien périr de manière idiote durant les jours a venir. Je frémis. Je sais que je ne suis pas prête à "monter sur le trône", pas prête à diriger mon Clan comme il le fait depuis un si grand nombre de lunes. J'espère qu'un jour, je serais prête à guider le Clan, son Clan, mon Clan de la façon la plus juste et le plus honorable qu'il soit.

Je me rapproche de mon chef et m'assois à coté de lui, comme quand j'étais sa jeune et turbulente apprentie. Comme lui j'admire la magnifique vue. Je tourne la tête et je pose sur lui un regard plein d'admiration et de tendresse pour le vieux matou fort et droit qu'il est et qu'il a toujours été.

Après quelques minutes, je me relève et me dirige vers le bosquet dont je suis sortie en disant :

- Il se fait tard, je rentre.

Mon aventure m'avais rassurée : je savais désormais où allais mon Chef si souvent, mais si je n'étais pas sure du pourquoi. Je pris donc le chemin du Camp, le cœur léger et l'esprit libre.

Hochant la tête, la lieutenante vint s’asseoir aux côtés de son chef.

Les deux félins observèrent le ciel en silence. Etoile de Mandragore, lui, se projetait dans les étoiles, parmi tous les défunts qu'il avait connu. Et surtout, il espérait que le jour où il les rejoindrait, il serrait pardonné par son frère. Ce dernier avait aspiré à devenir chef de la Brume, mais il mourut avant. C'est alors lui qui avait été choisit. Ce fut toujours un poids sur sa conscience. Il n'avait pas souhaité devenir chef, mais il le devint à la place du brave guerrier qu’eut été son frère. Et jamais ce dernier ne prit contact avec le meneur. Même lorsqu'Etoile de Mandragore gagna ses neuf vies, il ne vit pas son frère. Alors, maintenant qu'il s'approchait de la fin, il ne tarderai pas à le revoir. Lui, et tous les proches qu'il aimerait tant retrouver. Dans un soupir, il tourna la tête vers Lune Éternelle. Celle-ci s'en retournait, se dirigeant vers le buisson où elle était apparue.

« Il se fait tard, je rentre. »

Sur ces mots, elle disparut. Le vieux meneur resta là un moment, à observer le chemin par lequel était partit la jeune chatte. Sa silhouette se découpait dans le ciel nocturne, illuminé par la lumière blanche de la lune et des étoiles. Seul sur la corniche, il médita encore longtemps dans le silence de la nuit, demandant conseil à ses ancêtres. Il était alors le plus vieux chef encore vivant, et cette nuit, au sommet de ce promontoire, il semblait dominer la forêt entière. Ce n'est qu'au levé du jour, qu'il se leva. Sur ses pattes fatiguée, il fit demi-tour, reprenant le chemin vers son territoire. Alors, le mâle reprit ses tâches de chef, en espérant qu'il pourrait encore assumer ce rôle pendant plusieurs lunes encore.

[RP Terminé.]

Je déplace.